« Passeurs d’Histoire(s) » de Bernard Bourrié
Dans son ouvrage Passeurs d’Histoire(s), Bernard Bourrié retrace mille ans qui ont fait le Languedoc et le Roussillon à travers le destin de personnages : de Frère Bernard Délicieux à Elisabeth Eidenbenz qui a sauvé 595 enfants pendant la guerre de 39. Lorsque l’un meurt, c’est à ce moment que nait le suivant. On croise aussi bien d’illustres médecins comme Guy de Chauliac ou Pierre-Victor Galtier qui aurait découvert avant Pasteur, le vaccin contre la rage. Et aussi Pierre-Paul Riquet, le père du Canal du Midi ainsi que Falco de Baroncelli-Javon, l’inventeur de la Camargue.
Qui se souvient qu’Arago a participé à l’abolition de l’esclavage ? Et que Planchon, Viala, Marcelin Albert et Ernest Fréoul, ont inspiré à Steinbeck Les raisins de la colère ? Autant de célébrités et de presque anonymes qu’on retrouve avec plaisir dans cet ouvrage bien documenté. Facile comme un roman, instructif comme un essai.
Le Papillon rouge Editeurs.
Policier :
« Fleur de mort » de M.A. Graff
M.A. Graff est juriste de droit international, par son métier elle a croisé des affaires criminelles plus ou moins sordides ou fantastiques, qu’elle a peut-être démêlées. Elles lui ont inspiré plusieurs romans, dont Fleur de mort, Editions Ramsès VI. Qui a bien pu vouloir assassiner Saskia Van Duft, nez de parfumerie ? Une énigme que la sœur de la victime, Famke, va aider à résoudre. De coups de théâtre, en retournements de situations, le mystère s’épaissit, d’autant qu’un avocat américain est retrouvé mort dans sa chambre d’hôtel, alors qu’il n’avait reçu aucune visite, d’après la vidéo.
On plonge dans le milieu du luxe, de la parfumerie, de la finance, de la vengeance et de la haine extraordinaire. Et ne comptez pas sur les titres des chapitres pour vous faire une idée, ils sont légèrement décalés.
Patience, ne sautez pas une ligne, le dénouement en réjouira plus d’un. A glisser impérativement dans les bagages.
Editions Ramsès VI.
« L’amour en Super 8 » de Chefdeville
Dans son dernier roman, Houellebecq explorait les arcanes du milieu de l’art contemporain. Dans L’amour en Super 8, Chefdeville, alias Sergueï Dounovetz, traverse comme un chef, celui de la photographie. Mais aussi, ainsi que l’indique le titre, celui du cinéma, constamment sollicité comme un point de repère ponctuel qui rythme l’évolution du récit.
Ce dernier se déroule du point de vue du protagoniste, has-been amnésique et alcoolique, mais qui se refait petit à petit une santé professionnelle et sentimentale, au fur que la mémoire revient. Un peu comme dans le mythe d’Œdipe, ancêtre du roman policier, le narrateur découvre que l’on peut être et avoir été, qu’un visage et surtout un corps, féminin s’entend, peut en cacher un autre, le sien compris.
Et puis il y a la gouaille de Dounovetz, dont les héros n’ont pas froid aux yeux, ne résistent pas à la tentation d’un mot d’esprit, dont chacun sait qu’il est en relation étroite avec l’inconscient ; d’une audacieuse provocation y compris avec plus puissant que lui. Les habitants de Montpellier ou des P.-O. y reconnaîtront des lieux familiers. Une narration traversée de rêves, de passages érotiques des plus torrides et qui ne dédaigne pas le recours aux réseaux sociaux, même si c’est pour en accuser les dérives. Une perception littéraire de l’art photographique dont le Chefdeville du livre se révèle un maître étalon.
BTN – Edition Le Dilettante.
« Un major en Trégor » de Jean-Jacques Carrère
Une vallée en Cévennes a reçu le prix Pierre-Jakez Hélias en 2014, est-ce une des raisons pours lesquelles Jean-Jacques Carrère situe l’action de son nouveau livre en Bretagne ? Un major en Trégor ressemble à un scénario de la série Meurtre à… L’énigme est liée au patrimoine, à des sectes, à des documents anciens. Voltaire Mourdade, ancien gendarme à la retraite se repose à Tréguier lorsqu’il se trouve mêlé à une affaire policière ancienne non élucidée. Il fouine, un peu partout, tire des fils et s’implique, enquête en parallèle et trouve. Qu’est devenu la Croix de Grève ? On plonge ainsi dans l’histoire et les coutumes de la Bretagne profonde et de celle plus actuelle : la lutte des Bonnets rouges et celle des indépendantistes. Celle des jumelles Mireille et Viviane que tout oppose. Un roman complet à la fois polar et historique.
Éditions du Rouergue.
« Autoportrait à la valise » de Christine Avel
C’est le gros coup de cœur de cette année, déjà offert plusieurs fois. Autoportrait à la valise de Christine Avel est l’histoire d’une femme qui ne se pose jamais. Partir, toujours, revenir pour un nouveau départ. Un besoin irrésistible irraisonné la pousse. Besoin de se justifier ? Elle choisit un métier qui « l’oblige » à faire et défaire ses valises ! C’est bien commode.
Pas d’attache non plus, ou des amours compliquées avec Julien en particulier, qui la laisse libre. Et puis Simon. Comme son héroïne Christine Avel a travaillé sur des projets de développement en Afrique et en Asie avant de se poser avec ses valises à Montpellier. Il y a bien de l’autobiographie dans l’air. Et puis il y a cette situation ubuesque dans un aéroport en Birmanie. Ceux qui ont l’âme vagabonde, qui ont toujours un pied en l’air se reconnaitront et suivront avec délices la narratrice. Dés le début on la suit dans les transhumances vers la Grèce en voiture avec le père qui combine l’emplacement des bagages au centimètre près. Cela rappelle des souvenirs ? Christine Avel a un style simple actuel pour s’interroger sur sa passion, sa nécessité. Bref, un excellent roman.
Le Seuil.
« Les Rameaux d’argent » de Claude-Rose et Lucien-Guy Touati
Peut-on parler de roman régionaliste à propos du livre de Claude-Rose et Lucien-Guy Touat, Les Rameaux d’argent ? Oui, dans la mesure où l’action se passe du côté de Puechabon, au mas Lapierre, où vivent Antoinette et Victorien, issus de deux familles de ce coin de l’Hérault. Elle descend de potiers de SaintJean-de-Fos, lui d’origine paysanne, ses parents cultivaient l’olivier.
Non car si l’environnement tient une place importante, le sujet est aussi et surtout, l’histoire d’une histoire d’amour romantique. Catherine qui vit à Paris, quitte la capitale et se réfugie chez ses grands-parents qu’elle n’a pas vu depuis un certain temps. Son intrusion va bouleverser la vie fusionnelle d’Antoinette et Victorien. Pour elle, ils acceptent de revivre les grandes étapes de leur passé. On est touché par la tendresse et les liens de confiance qui se tissent entre le couple âgé et leur petite-fille. A la veillée ils échangent leurs secrets avec une pudeur extrême. Un livre intimiste très attachant.
De Borée Editions.
« L’Escale » de Virginie Jouany
Comme Chef, Rose est au bord du gouffre. Mais la comparaison s’arrête là. L’héroïne de l’Escale de Virginie Jouany est née sous une très mauvaise étoile, elle accumule les malheurs comme d’autres les perles, elle est prête à sauter dans le vide, dans son village du Périgord, lorsqu’Oscar lui tend une main secourable. Revirement complet de situation, tout ce qu’approche Rose se transforme en réussite.
Elle vit avec son sauveur près d’Arcachon une belle histoire d’amour passionnelle. Une catastrophe vient rompre le bel équilibre et le bonheur tranquille. Les ennuis reviennent en force, les deux héros déboussolés entrent dans une phase de suspicion, tout s’écroule. Et l’histoire tourne au cauchemar surréaliste. On est pris par ces deux héros pour lesquels on ressent une grande empathie. Virginie a l’art de ménager ses effets et de transformer ce qui aurait pu être un mélo en formidable roman aux effluves d’océan déchainé, comme la passion qui parcourt dans ce livre.
La Compagnie du livre.
Sport :
« Pourquoi le foot ? » de Philippe Villemus
Tout ce vous voulez savoir sur l’histoire du ballon rond sans avoir osé le demander, de peur de passer pour un cuistre auprès des copains cultureux et d’un ignare auprès des footeux. Philippe Villemus, professeur-chercheur à Montpellier Business School, répond dans Pourquoi le foot ? Il fait remonter l’origine de ce sport aux hommes préhistoriques. En revanche il admet que ce sont les Anglais qui ont codifié le sport actuel, descendant de notre soule, dont Ronsard aurait été un ardent défenseur. Le nombre de joueurs aurait deux origines, mais serait vraisemblablement un héritage des collèges anglais, encore. L’auteur en 54 questions pertinentes ou saugrenues, effectue une radiographie sans concession de ce sport qui déchaine les passions. Il finit par se demander si le foot, objet de tellement de dérives à l’image de notre société ne devrait pas évoluer ? Et si c’était cela la vraie question ? Avec ses codes, ses rites, ne serait-il pas une métaphore de la vie ?
Le Papillon rouge Editeur.
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